Les îles Gambier, un Musée d'Histoire pour l'Océanie

Les îles Gambier, un Musée d'Histoire pour l'Océanie

. Astres et équinoxes

Père Laval : Mangareva Histoire ancienne : P. 214

"J'ai commencé l’énumération des douze lunes par celle qui correspond à notre mois de décembre, parce que c’est à cette époque que le solstice de leur été a lieu. Ils avaient de père en fils des observatoires pour reconnaître le jour précis du solstice. Taku avait son observatoire, de même qu’Ati-tuiti et Akamaru. C’est au soleil levant que Taku et Akamaru faisaient leur observation. C’est au soleil couchant que la faisaient Ati-tuiti et Akamaru. Deux longues pierres dressées côte à côte, sur une petite montagne à l’Est composaient l’instrument et l’observatoire de Taku. Une petite pierre plate au milieu de la petite peuplade appelée Akaputu servait de siège au savant qui allait s’y installer pour voir tous les matins si le soleil était arrivé entre ces deux pierres. Aussitôt qu’il y entrait, on s’écriait : « Le soleil est arrivé à son lieu de repos. Kua no’o te ra i tote rua. » Si le soleil, en montant mettait du temps à se détacher de la montagne, on disait qu’il était chargé de nourriture pour cette année, c’est-à-dire que la récolte allait être abondante. Si, au contraire, il se détachait de suite, c’était signe qu’il était fort léger, c’est-à-dire sans fardeau et qu’alors la récolte ne donnerait rien ou fort peu. Le point de mire pour Ati-tuiti était sur la montagne Aga-kaui-tai, du côté de Taravi, et celui d’Akamaru sur l’un des îlots les plus à l’Ouest, et du côté de l’Est, la montagne appelée Aga-one. Quat aux pronostics au sujet d’une bonne ou mauvaise saison de fruits, ils pouvaient être fondés sur l’état de l’atmosphère. Quand le soleil mettait longtemps à se détacher de la montagne, c’était un indice que l’atmosphère était humide et chargée de vapeurs, ce qui devait exercer une influence favorable sur la floraison de l’arbre à pain. Au reste, l’expérience prouve qu’il faut à l’arbre à pain une alternance de pluie et de soleil.
Le solstice d’hiver avait aussi ses repères. Le plus renommé est l’ombre du pic de Mangareva, du côté d’Ati-tuiti ; on savait qu’elle ne dépassait telle pierre et, quand elle était parvenue à cette limite, on criait : « Kua no’o te maru i to te rua », c’est-à-dire « l’ombre est arrivée à son lieu de repos ». C’était au commencement de la lune appelée pipiri qui correspond au 21 juin**. Leurs lunes étaient composées de 30 jours, ce qui faisait 360jours pour l’année. Comment s’arrangeaient-ils donc pour s’y retrouver avec leurs véritables saisons solaires ? Leur histoire n’en dit rien. Mais voici les noms qu’ils donnaient à chaque jour de leurs lunes :

** Le soin apporté par les Mangaréviens à l’observation exacte des solstices est un trait particulier à leur civilisation et que l’on ne retrouve nulle part ailleurs en Polynésie. Ces observatoires étaient appelés ‘akano’oga ra. Ils consistaient en un poste d’observation et en points de repères indiquant la limite du mouvement apparent du soleil aux solstices d’été et d’hiver. Le soleil levant (ra re’ure’u) était observé à son lever au-dessus de la chaîne centrale de l’île ou sur les îles situées en face de l’observatoire. Il en était de même avec le soleil couchant. Les observations se faisaient au matin ou au soir, selon que les points de repère étaient pris à l’Est ou à l’Ouest. L’observatoire de l’île d’Akamaru s’appelait Turipagu, celui d’Ati-tuiti, Te Rua-ra. Ce dernier poste d’observation était le plus favorable, car, étant situé sur le côté Sud de Mangareva, , on pouvait viser le soleil à son lever et à son coucher. La chronique indigène dit : « on observait sur l’île d’Aga-kau-i-tai, la grotte Tetea. »
A Taravai le soleil levant était observé à son passage entre Kavi et l’îlot Motu-o-ari sur la côte Est de Taravai, probablement dans le village de Aga-kona.
Akaputu est placé sur la côte Nord-Est de Mangareva. On y observait le soleil lorsqu’il se levait sur les îlots du récif de l’Est. Les deux points de repère étaient les îlots Vai-o-moaiti et Vai-o-puri. La position du soleil était décrite en disant qu’il se trouvait au-dessus d’un certain îlot.
Grâce à ses observations, les savants étaient à même, dit la tradition, de prédire les années d’abondance ou de disette et d’annoncer les vents. Les Mangaréviens avaient donc un système établi pour déterminer différentes périodes de l’année solaire. Il est probable que la nouvelle année commençait avec la nouvelle lune après le solstice d’hiver (21 juin). En ce cas, il est nécessaire d’intercaler un mois supplémentaire chaque fois que le solstice d’hiver ne coïncidait pas avec le douzième mois. L’observation des solstices leur donnait le moyen de vérifier et de corriger le cycle annuel des mois lunaires".



24/08/2015
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